Malgré l’encadrement des loyers, créé par la loi Alur en mars 2014, aujourd’hui, 23% des offres locatives immobilières à Paris sont encore illégales. Pourquoi ? Parce que le montant des loyers affichés ne respecte pas la loi. Mais, le plus inquiétant, c’est l’augmentation du nombre de ces annonces sur les plates-formes des professionnels.
Encadrement des loyers, la loi pas encore suffisamment appliquée. Première ville à avoir mis en place la loi ÉLAN en juillet 2019, c’est Paris. Depuis, d’autres agglomérations ont suivi comme Lille, Lyon, Montpellier, Bordeaux, et enfin, Marseille en 2023. Déjà, en août 2023, selon la Fondation Abbé Pierre, 35% des annonces dépassaient le loyer plafond. Mais, locataires attention, le montant des loyers peut varier selon les villes. Une enquête, récemment publiée, démontre que dans le secteur de l’immobilier et surtout de la location, les annonces en infraction sont en progression. On dénombre encore plus d’annonces de location illégales chez les professionnels, tels que les agences, les mandataires et sur les plates-formes…
Immobilier location : encore plus d’annonces en infraction
C’est le constat réalisé par la CLCV* à la suite de son enquête à Paris comme en Seine-Saint-Denis (93). Encore trop d’annonces immobilières locatives publiées sont en infraction à l’égard du montant du loyer demandé. Ainsi, l’association divulgue, début octobre, la liste des sites web avec leur pourcentage d’annonces affichant des demandes de loyers illégaux. Donc, pour découvrir noms et prorata, regardez le graphique ci-dessous.
MÉTHODE DE CALCUL
Échantillon représentatif :
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1 800 annonces immobilières
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Répartition :
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1 000 à Paris
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+ 400 en Plaine Commune
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+ 400 en Est Ensemble
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Date :
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Entre octobre 2022 et août 2023
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Retenues :
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Les annonces proposant un loyer “Hors-charges”
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Et surtout sans complément de loyer
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NOMBRE D’ANNONCES DE LOCATION IRRÉGULIÈRES SUR LES SITES INTERNET
LE TAUX D’ANNONCES IMMOBILIÈRES LOCATIVES DANS LESQUELLES LES LOYERS SONT EN INFRACTION AVEC LA LOI.
© Anne-Marie HALBARDIER – Source : CLCV
L’analyse du graphique dévoile selon David Rodrigues** : « Parmi les 1 800 annonces immobilières étudiées dans ces deux départements, 69% respectent l’encadrement en vigueur. Finalement, c’est le meilleur résultat depuis le lancement de l’expérimentation en 2015. Cependant, cela signifie que 31% des annonces sont encore illégales. À Paris, 23% des annonces sont non conformes, sans doute par crainte de sanctions, contre 40% en Seine-Saint-Denis où l’encadrement a été adopté plus récemment. En bref, on note encore plus d’annonces en infraction chez les professionnels.
Pourtant, sur le sujet de la location, la mairie de Paris a mis en service une plate-forme permettant aux locataires de vérifier si le montant de leur loyer est abusif ou non. Si oui, les bailleurs-propriétaires peuvent être sanctionnés.
La location immobilière : non, les hébergeurs de contenus ne sont pas de bons élèves
Entre les résultats de l’enquête de 2021 et celle d’aujourd’hui, la constatation est simple, déclare l’auteur de l’étude : « Encore trop de portails hébergent des annonces illégales. Et parmi ces annonces de location, celles des professionnels augmentent avec des dépassements de loyer en hausse eux aussi. C’est quand même un comble ! »
Afin de continuer le combat, une nouvelle fois, la CLCV examine les annonces de locations affichées sur les plates-formes. Par conséquent, parmi les annonces de location immobilière recensées, comme pour l’année 2021, c’est Leboncoin qui arrive en tête. Sur ce podium de la non-conformité, il atteint un taux de 42%. D’ailleurs, « Il est étonnant de voir à quel point ce site ne se sent pas concerné par les évolutions législatives et ne vérifie même pas si les annonces publiées reprennent à minima les informations obligatoires comme le montant des charges mensuelles ! », déclare le juriste. D’ailleurs, malheureusement, entre les 2 enquêtes, on note une forte progression des annonces de location immobilière en infraction.
© Pik gratuit
Annonces immobilières locatives : la réponse des hébergeurs de contenus
Concernant leboncoin. Aux dires d’Aurélien Flament***, cette vérification n’est pas la sienne : « Nous sommes hébergeurs de contenus. Donc, nous faisons de la pédagogie, mais nous n’avons pas cette obligation qui relève de la responsabilité des bailleurs. »
Pour Bien’ici. Qui arrive juste derrière, 2e du classement avec 40% de petites annonces immobilières hors-la-loi, la réaction est sensiblement identique. « Nous n’intervenons pas dans la fixation et le contrôle du loyer. Nos clients gèrent eux-mêmes le contenu de leurs annonces. », nous explique Philippe de Ligniville****.
Les 3 suivants, SeLoger (36%), ParuVendu (34%) et la FNAIM (22%) sont surveillés de près par l’association CLCV. « La rédaction de leurs annonces est catastrophique. De plus, elle régresse même par rapport à 2021. Ce qui est fou quand même, surtout pour une fédération professionnelle comme la FNAIM qui a un devoir d’exemplarité. », rage David Rodrigues. Car on retrouve encore trop d’annonces de location illégales en ligne.
SeLoger pense proposer un renseignement supplémentaire aux locataires en affichant sous l’annonce une fourchette “Basse ou Haute” par rapport au prix moyen des biens similaires dans le secteur.
Du côté de la FNAIM (Grand Paris) et son président : « Près de 80% de nos professionnels respectent l’encadrement des loyers. », affirme Olivier Princivalle. Le réseau s’efforce aujourd’hui d’actualiser ses programmes informatiques.
© AM HALBARDIER – Rawpixel.com
Particuliers ou professionnels : qui respectent le mieux la réglementation ?
Pourquoi un tel dérapage dans les locations immobilières ? Selon l’association : « C’est premièrement la marque d’une perte de compétence des professionnels et celle-ci est à l’origine d’une très large majorité d’annonces publiées sur ces sites. »
Ainsi, sur les 2 départements, Paris et la Seine-Saint-Denis, le nombre d’offres d’annonces conformes chute de 79% en 2021 à 74% en 2023. En revanche, concernant les annonces de location des particuliers, l’enquête dévoile qu’ils respectent de mieux en mieux la législation avec +11%… en passant de 55% en 2021 à 66% aujourd’hui. Cependant et malheureusement, c’est encore un nombre d’infractions beaucoup trop important pour les annonces locatives immobilières.
Tout d’abord, « Depuis le Covid, les gestionnaires habitués à rédiger les annonces de ventes ou locatives ont cédé la place à des commerciaux qui n’ont pas ou trop peu été formés. », analyse David Rodrigues. Et surtout : « Mal rédigé, c’est aussi une façon déguisée bien pratique de dépasser les plafonds et de contourner la loi ! » Pour toutes locations, propriétaires-bailleurs ou professionnels, vous avez des obligations d’états.
© AM HALBARDIER – Rawpixel.com
Location : « Peur de perdre les bailleurs, qui passent notre porte »
C’est ce qu’affirme un responsable d’une agence parisienne. « Vu les difficultés pour boucler une vente en ce moment, nous ne pouvons pas renoncer aux locations et renvoyer les bailleurs qui passent notre porte […] car beaucoup nous menacent d’aller voir ailleurs si on corrige leur loyer. » Par exemple, en 2021, le montant mensuel hors-la-loi était de 92,83€ à Paris.
Aujourd’hui en chiffre, la moyenne de surloyer illégal chez :
En 2023
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Un professionnel
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Un bailleur particulier
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Paris
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178,60€/mois
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137€/mois
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Seine-Saint-Denis
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122,60€/mois
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153€/mois
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© Anne-Marie HALBARDIER – Source : CLCV
Comment endiguer la progression du nombre d’annonces locatives en infraction
La conclusion de David Rodrigues : « Il devient urgent que le gouvernement siffle la fin de la récré et impose un modèle type d’annonce à tous, professionnels comme particuliers. »
Avec 22% d’annonces de location illégales, la FNAIM se situe dans les 6 plus respectueux. Donc, le syndicat des professionnels abonde dans le sens de cette demande. Quant au réseau d’agences, Guy Hoquet, lui, ne souhaite pas attendre : « Du travail reste à faire et nous serons sans concession avec celles et ceux de notre réseau qui ne respectent pas la loi comme nous le faisons en matière de discrimination. »
Enfin, pour le site PAP “De Particulier à Particulier”, mal classé en 2021 avec 44%, sa présidente Corinne Jolly, nous révèle : « Afin d’endiguer cette progression, nous avons importé dans notre logiciel les plafonds de loyer des 23 villes françaises concernés par l’encadrement pour automatiser leur calcul à la rue près. Par conséquent, cela informe instantanément nos bailleurs. »
PAROLE D’EXPERT
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*CLCV : L’association consommation, logement et cadre de vie.
** David Rodrigues : juriste et auteur de l’étude.
*** Aurélien Flament : Directeur du marché immobilier sur leboncoin.
**** Philippe de Ligniville : Directeur général adjoint chez Bien’ici.